ORGANISATIONS : L’ÉCOLE CLASSIQUE ET LE FORDISME
Premier article de la série consacrée aux organisations d’entreprise : l’école classique du management organisationnel 🚀.
INTRODUCTION
C’est dans un contexte de deuxième révolution industrielle (1870 – 1945) qu’est né le courant de pensée classique du management. Les premiers auteurs ayant étudié les organisations d’entreprise sont :
- Frédérick Winslow TAYLOR 🇺🇸
- Henri FAYOL 🇫🇷
- Max WEBER 🇩🇪
Le deuxième révolution industrielle est marquée par une augmentation de la production, des échanges et des besoins.
Deux nouvelles énergies voient le jour :
- l’électricité ⚡
- le pétrole ⛽
L’exploitation de ces deux nouvelles énergies va entraîner un effet de levier important pour la production industrielle (moteur à explosion pour l’automobile, éclairage des usines…) et le transport. De nouveaux secteurs d’activité voient le jour : le gaz, l’aluminium, les textiles artificiels…
🧠 La science, l’ingénierie et la recherche se développent fortement et intègrent de plus en plus des entreprises qui font fasse à une demande croissante.
C’est bel et bien une révolution… industrielle donc.
L’activité des entreprises battant son plein, de nouveaux modes d’organisation du travail apparaissent, caractérisés par :
- la mécanisation et l’intensification des rythmes de travail
- une meilleure qualification d’une partie de la main-d’oeuvre
- structuration et spécialisation des activités
1 – AUTEURS ET THÉORIES DE L’ÉCOLE CLASSIQUE DU MANAGEMENT
1 . 1 – Frédérick W. TAYLOR
1856 – 1915
Qui n’a jamais entendu parlé de Taylor ?
Frédérick Winslow TAYLOR est un ingénieur et théoricien américain, connu pour sa vision scientifique de l’organisation de l’entreprise.
« Le freinage systématique est pratiqué par les ouvriers dans l’intention délibérée de maintenir leur patron dans l’ignorance de la vitesse à laquelle on peut accomplir un travail »
Le point de départ de sa théorie est que le manque de productivité des entreprises est dû à « la flânerie » des ouvriers et l’ignorance de l’encadrement :
- les ouvriers pensent que l’augmentation de la productivité est en lien avec le chômage : plus ils sont productifs, plus les effectifs risquent d’être réduits
- les modes de rémunération ne sont pas incitatifs : d’un côté Taylor estime qu’une partie des ouvriers est trop peu payée, et d’un autre il explique que le salaire à la journée n’incite pas les ouvriers à produire des efforts supplémentaires (car non récompensés)
- le recours à des pratiques professionnelles empiriques et peu rigoureuses : les ouvriers ne maîtrisent pas « la science de l’organisation »
- l’encadrement est également ignorant de la science de l’organisation (méconnaissance des modes et des temps opératoires)
⇒ Il met alors au point le concept d’OST : l’organisation scientifique du travail
L’OST est un système comprenant un ensemble de méthodes et de moyens ayant pour but de transférer la détermination du travail des ouvriers (en termes de modes et de temps opératoires) à la direction.
Pour mettre en place l’OST, Taylor va effectuer l’étude des temps et des mouvements 🧐 ⏱. Selon lui, il existe qu’une seule manière d’accomplir une tâche donnée : le « One best way » et cela passe par la conception de standards et de normes précises pour chaque tâche à exécuter.
- définir la séquence idéale des mouvements à effectuer (mode opératoire)
- chronométrage de chaque mouvement (temps opératoire)
- créer une norme standardisée par tâche, qui sera prescrite et généralisée à tous les ouvriers
⇒ Les méthodes de travail deviennent rationnelles
L’application de ces observations scientifiques, de la rationalisation et du contrôle des tâches abouti à une double division du travail :
- la division verticale : c’est le principe de la séparation de la conception et de l’exécution. Seuls « les bureaux » (composés d’ingénieurs instruits) disposent des compétences, de la rationalité et du temps permettent de concevoir des méthodes de travail scientifique. L’objectif du bureau est d’établir « la seule et la meilleure façon de travailler en un minimum de temps » : c’est le fameux One best way.
« Aux bureaux de penser, aux ateliers d’exécuter »
- la division horizontale : à chaque opérateur est attribué une seule et unique tâche, la plus simple possible, afin d’automatiser et d’accélérer les gestes. C’est la parcellisation des tâches des ouvriers.
Les principes de Taylor, appelés « Taylorisme » sont appliqués progressivement aux États-Unis à partir du début du XXeme siècle, puis très largement en Europe.
1 . 2 – Henri FAYOL
1841 – 1925
Henri Fayol était un ingénieur et théoricien français, ayant exercé les fonctions de directeur général d’une société minière pendant trente années. Ses travaux sur les organisations ont été élaboré à la même époque que ceux de Taylor.
Il partage avec Taylor le principe de division du travail :
« L’ouvrier qui fait toujours la même pièce, le chef qui traite constamment les mêmes affaires, acquièrent une habilité, une assurance et une précision qui accroissent leur rendement. »
Mais contrairement à Taylor dont l’étude de l’organisation de l’entreprise était centrée sur les ateliers de production, Fayol s’est focalisé sur la direction de l’entreprise et sur la fonction d’administration. De plus, il ne s’appuie pas sur des recherches scientifiques, mais sur sa propre expérience de dirigeant.
En effet, du fait de sa grande expérience des fonctions de direction, Fayol estime que les entreprises sont organisées en « fonctions ». Ces fonctions correspondent à toutes les activités de l’entreprise :
Cette division de l’entreprise en fonction est tout à fait pertinente, mais non pouvons tout de même ajouter 2 fonctions :
- les ressources humaines
- la recherche et le développement
La fonction administrative correspond au management d’aujourd’hui.
Henri Fayol est le premier auteur à avoir mis au centre de l’organisation de l’entreprise cette fonction, où est centralisée la prise de décisions.
Il a défini 14 principes indispensables à l’efficacité de la fonction administrative :
L’organisation de l’entreprise en fonctions ainsi que le rôle important de la direction (à travers les 14 principes ci-dessus) constituent des apports considérables au management d’entreprise. Je trouve que ces principes d’organisation sont toujours applicables de nos jours (soit 100 ans plus tard). Cela démontre la pertinence des travaux d’Henri Fayol sur les organisations d’entreprise et le rôle de la direction.
1 . 3 – Max WEBER
1864 – 1920
Max Weber est un sociologue allemand. Spécialiste du droit, il est l’inventeur de l’organisation bureaucratique. Pour Weber, le concept au centre de l’organisation de l’entreprise est l’autorité.
On reconnait bien dans le modèle d’organisation de Weber la discipline et l’efficacité allemande : conception d’un cadre de travail formel (notes de service, procédures administratives) permettant de maintenir l’ordre et entraînant le progrès et l’innovation.
Max Weber distingue 3 types d’organisation, fondés sur les caractéristiques de l’autorité au sein de l’entreprise :
Selon Weber, l’organisation rationnelle est la forme la plus efficace et la plus appropriée aux grandes organisations.
Il défini 6 principes sur lesquels l’organisation bureaucratique repose :
L’école classique, à travers les travaux importants de ces 3 auteurs principaux, a permis de donner un cadre d’organisation ainsi que des principes de base aux grandes entreprises. Un modèle d’organisation emblématique de la 2eme révolution industrielle est apparu, suite à l’application des principes de l’école classique : le Fordisme
2 – LE FORDISME
Henry FORD (1863 – 1947)
Le Fordisme c’est avant tout un homme : Henry FORD.
Entrepreneur américain, il a fondé la célèbre marque automobile du même nom, et a révolutionné l’organisation de la production industrielle en son temps.
Ford était un ingénieur en chef, passionné par la mécanique et l’automobile depuis son tout jeune âge. Il co-fonde la Henry Ford Company en 1901.
Son objectif est de produire en masse des automobiles pour permettre à tout un chacun d’acheter un véhicule.
Il voit dans la consommation la clé de la paix.
« La plus haute finalité de la richesse n’est pas de faire de l’argent, mais de faire que l’argent améliore la vie »
Outre la prise de risque et le charisme, ce qui caractérise le plus souvent les entrepreneurs c’est leur manière de résoudre les problèmes. Afin de pouvoir produire en masse ses automobiles, Ford était confronté à deux principaux problèmes :
- comment mettre en place un mode de production de masse ?
- comment limiter l’absentéisme des ouvriers pour maintenir les cadences de production ?
💡 Ford s’est inspiré des principes de l’école classique et notamment de l’OST de Taylor.
Les 3 grands principes introduits par le Fordisme sont :
- la standardisation du produit
- le travail à la chaîne
- l’augmentation du pouvoir d’achat des ouvriers
La standardisation du produit
« Les gens peuvent choisir n’importe quelle couleur pour la Ford T, du moment que c’est noir. »
Le principe est simple : produire en masse un seul et même produit strictement identique.
🏭 C’est la révolution de la Ford T noire
La standardisation produit se matérialise par l’utilisation de pièces standards, parfaitement interchangeables dans la construction et la maintenance des véhicules. Cela permet une accélération de la production (expansion géographique de la Ford T) et une simplification de la maintenance (réparation simplifiée, envoi postal des pièces détachées).
La production de masse
Afin de pouvoir produire ses véhicules en masse, Ford a mis au point une nouvelle organisation, reposant sur :
- la parcellisation des tâches
- la spécialisation du travail
- l’introduction du convoyeur
⛓ C’est la naissance du travail à la chaîne
➡️ Conséquences :
- c’est la machine (le convoyeur) qui fixe le rythme de travail (la cadence)
- les pièces se déplacent, moins de manutention
- économies d’échelle importantes
- gains de productivité
L’augmentation du pouvoir d’achat des ouvriers
Henry Ford a eu une idée révolutionnaire : augmenter les salaires de ses employés pour augmenter les profits de l’entreprise.
Pour n’importe quel comptable il s’agit d’une réelle dichotomie car augmenter les salaires entraîne une hausse des charges et donc une baisse du résultat de l’entreprise.
Et pourtant, en augmentant les salaires de ses employés, Ford a réalisé encore une fois une énorme économie d’argent pour son entreprise.
En effet, l’augmentation des salaires a permis :
- de diminuer le turn-over (et donc les coûts)
- d’améliorer la motivation du personnel
- aux ouvriers d’accéder à la consommation de biens standardisés
💵 C’est le principe du « Five dollars a day »
Le modèle d’organisation de Ford, basé sur les 3 principes vu ci-dessus entraîna le développement des entreprises de production de biens standardisés et de la consommation de masse.
Ce modèle a par lui suite montré ses limites et fut décrié, notamment dans le chef d’oeuvre Modern Times (Les Temps modernes, de Charlie Chaplin).
CONCLUSION
La deuxième révolution industrielle marque un grand changement dans l’économie et dans les modes de vie :
- consommation et production de masse
- innovations (de produits, de marchés, organisationnelle)
- travail qualifié (la science se professionnalise)
- des transports plus modernes
Les auteurs de l’école classique ont énormément apporté pour l’organisation des entreprises. A travers leur vision technique, ils ont donné aux entreprises des moyens de se développer afin de répondre aux besoins et vaincre certaines difficultés techniques.
Cependant, ce modèle basé sur la division et la spécialisation du travail, très rigide, éprouvant voire simpliste s’est confronté à de nombreux problèmes dans les entreprises :
- perte de qualification du travail ouvrier
- travail répétitif et monotone : plus de risque de turn-over et d’accidents du travail
- manque de réponses aux besoins de diversification de la demande
Il faudra attendre la 3eme révolution industrielle pour voir une nouvelle rupture des schémas d’organisation inspirés du Fordisme, commençant à s’essouffler.
Dans le prochain article sur les organisations, nous traiterons d’un nouveau courant de pensée datant des années 1950 à 1970.
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